LE CHANT DES ARBRES

Les arbres semblent immortels. Certains ont plus de 10 000 ans. Cette longévité, bien au-delà d’une vie humaine, confère aux arbres cette part d’ancestral et de mystère qui nous plonge au plus profond de nos racines, bien au-delà de toutes mémoires. Ils incarnent le vivant premier tel que l’on désire le voir : altruiste et bienveillant. On parle des ou de l’arbre en général, avant de préciser spécifiquement la variété d’arbre, tout comme on pense au langage avant le phonème, à l’écriture avant l’alphabet, à la musique ou au chant avant la note. Chaque espèce d’arbre a ce rôle d’unité dans un ensemble, d’individualité dans le communautaire. La forêt de toutes les espèces figure un peuple harmonieux, vibrant au son d’une symphonie mélodieuse. Chaque essence d’arbre comme un instrument de cet orchestre a son langage et sa sonorité propre, son chant spécifique.

"Assieds-toi au pied d’un arbre et avec le temps tu verras l’univers défiler devant toi." (proverbe africain)

LE CÈDRE BLEU

Mage venu de l’Orient lointain jusqu’à nos montagnes, il apporte le savoir des étoiles et le parfum d’encens des anciennes religions. Obscur et silencieux, il médite et s’interroge, oscillant entre deux mondes. Il connait les mystères des profondeurs et ceux des prairies.

L’ÉPICEA

Impassible, au milieu de l’averse, il attend la relève. Au loin gronde la tourmente. Il s’habille d’un long manteau protecteur pour cacher son désarroi. Ailleurs, dehors, amis ou ennemis ? Déjà il a croisé des soldats en déroute et des esprits hagards et les a protégés de la fureur des hommes.

L’EUCALYPTUS

Il s’étire et s’effiloche, s’emmêle dans l’espace et le vent. Son souffle parfumé nous plonge dans un rêve hypnotique et langoureux. Il est vrai que sa forêt abrite des elfes et des fées, Les contes et légendes s’y construisent.

DANS LE CHOIX DU THÈME "LES ARBRES", JE M’INTERROGE SUR CE MONDE DU SENSIBLE...

... et je recherche dans chacun d’eux nos émotions et sentiments premiers, ces caractères ataviques, départ du plus infime filament de nos racines qui construise chaque individu de façon personnelle et unique. Je transcris visuellement la mélodie propre à chaque espèce, sa place et sa note particulière dans le concert symphonique de la grande forêt. Je traduis graphiquement et par le jeu des matières et des couleurs, les vibrations d’une variété d’arbres et l’émotion qui s’en dégage. Chaque pièce est consacrée au chant d’un arbre, vu seul ou en groupe, interprété selon mes réactions physiques, émotionnelles et intellectuelles. Pour cela, je m’immerge dans son environnement, me plonge dans son univers afin d’être envahie par sa musique. Tous les écrits, poèmes, croyances, mythologies et légendes ressurgissent aussi et se mêlent alors à mes émotions. Au final, la petite musique que je propose peut correspondre à chacun de nous, ou non, la mémoire personnelle chevauchant souvent la mémoire collective. Nous sommes nous aussi des individus spécifiques au milieu d’une communauté plus ou moins harmonieuse….

L’OLIVIER

II arrache sa vie du caillou et sans cesse se renouvelle mais son feuillage lunaire calme les ardeurs du soleil. Sur la colline asséchée, il se pense divin. Tortueux mais paisible, bercé par le bruissement des cigales, Il rêve à son olympe. Heureux celui qui comme lui a les pieds bien sur terre et la tête dans les nuages : c’est un Sage : il portera beaucoup de fruits.

LE PEUPLIER

Ses branches cherchent le ciel. Son écorce tisse une voie lactée. Ses racines se cachent dans l’herbe. Il aime s’entourer de ses proches. Ensemble, ils orchestrent un espace vaporeux et fragile.

LE SAULE PLEUREUR

Il se balance dans la brise, les algues ondoient sur le lac. Il s’étire alangui, les cheveux défaits. Solitaire et nostalgique, le silence est son royaume. Il abrite les secrets et se nourrit du vol des libellules. Le saule trempe ses branches dans l’eau et sourit aux algues. C’est le début du monde.

(pièce vendue)

LE BOULEAU

Léger et fragile, le bouleau aime la compagnie de ses frères ils se murmurent des secrets et se répondent en chantant. Le rythme de cette mélodie les entraine dans un danse balancée, Douce et tendre qui s’élève sous le vent.

L’ÉRABLE

Ce n’est pas par orgueil s’il se pare ainsi. Il veut juste connaitre la chaleur du foyer quand le frimas s’installe. Il pense qu’il va ainsi séduire les étoiles, attirer les amants et prolonger la fête au-delà de l’été. Il prend sa place et il attend son heure ; rien ne sert de se presser. Quand les autres s’assoupissent, il brille alors de tous ses feux et réchauffe le cœur des hommes.

(PIÈCE VENDUE)

FRÊNE

Au détour du chemin, il s’impose majestueux mais discret à la fois. Son tronc solide et tortueux, semble excessif sous sa ramure légère où chuchotent ses feuilles frémissantes. Il nous invite sous son ombrage à deviner ses attentes.

LE MÉLÈZE

Altier et digne, il ne semble pas remarquer notre présence. Ne serait ce pas pour nous dissuader de l’approcher. Il veut rester seul avec ses congénères pour débattre sur leur avenir et élaborer ensemble, par réflexions et calculs, un remède pour leur survie.

LES BOULEAUX

Léger et fragile, le bouleau aime la compagnie de ses frères. Ils se murmurent des secrets et se répondent en chantant.
Le rythme de cette mélodie les entraine dans un danse balancée, douce et tendre qui s’élève sous le vent.

L’AULNE

Léger et doux, il se déploie vers le ciel, il voudrait être Ciel Est-ce pour son immensité, sa clarté, son azur? Ou bien se croit-il à ce point divin ? D’ailleurs, ne se fait ’il pas parfois appeler « imperialis »…

LE CHÊNE VERT

Semblant trop gros, trop lourd pour cette terre pauvre, Il s’agrippe aux cailloux épars autour de lui. Ses bras voudraient toucher son voisin, mais il hésite, n’ose pas. Un peu sauvage, un peu timide, tourmenté, Ses feuillage persistant qu’il a emprunté aux houx le protège.

Prises de vue photo des pièces : Xavier Pagès (xpages-photographe.com)